L'Agence européenne de sécurité alimentaire (Efsa) a publié, ce 23 avril, les données annuelles de ses deux programmes de surveillance (1) des résidus de pesticides dans l'alimentation pour 2022. Et si les résultats continuent de montrer une amélioration pour les consommateurs, certaines nuances restent inquiétantes.
Néonicotinoïdes encore présents dans l'alimentation européenne
Les autorités compétentes des 27 États membres de l'Union européenne, ainsi que celles de l'Islande et de la Norvège, ont fourni les résultats d'analyse de 110 829 échantillons alimentaires à l'Efsa – un record – dans le cadre du programme pluriannuel de contrôle national (MANCP (2) ). L'ensemble de ces aliments a été vendu en Europe, mais ces denrées peuvent provenir des pays concernés comme d'autres pays européens ou de pays étrangers, être bruts ou transformés, d'origine animale ou végétale, issue de l'agriculture conventionnelle ou biologique et destinés à l'alimentation humaine ou animale.
En moyenne, 59 % d'entre eux attestent de la présence d'au moins un pesticide, mais en quantité insuffisante pour être proprement quantifié. Du reste des échantillons dont la limite de quantification (LQ) a été franchie, ils sont entre 2,2 et 3,7 % dont les résidus de pesticides dépassent les limites maximales résiduelles (LMR) autorisées. À titre de comparaison, ce dernier résultat oscillait entre 2,5 et 3,9 %, pour les lots analysés en 2021, et entre 3,6 et 5,1 %, en 2020.
Environ 23 % des échantillons présentaient plus d'un pesticide quantifiable. Le chlorpyrifos, l'acétamipride et l'imidaclopride, trois néonicotinoïdes, sont les pesticides les plus rencontrés parmi ceux dépassant les LMR. Le glyphosate, quant à lui, n'a été détecté et quantifié que dans 1,8 % de tous les échantillons, dépassant sa LMR dans 0,3 % des cas. Dans le détail, les aliments transformés (8 % du total) attestent du même taux de contamination que la moyenne générale (entre 2,3 et 3,7 % au-dessus des LMR) tandis que les aliments destinés aux animaux (20 % du total) demeurent très peu touchés (moins de 1 % présente des pesticides au-dessus de leur LMR). À l'inverse, entre 2,4 et 18,6 % des échantillons d'origine biologique (6 % du lot) comportent des résidus de pesticides excédant leur LMR, quoiqu'il s'agisse en grande majorité de dérivés du cuivre.
Concernant la répartition géographique, plus de la moitié des échantillons (52 %) provenaient directement des pays participants, contre 13 % importés depuis un autre pays de l'UE et 35 % depuis un pays tiers ou inconnu. Parmi les pays européens, Chypre (11 %), la Tchéquie (10 %) et le Portugal (10 %) concentrent le plus d'aliments présentant des résidus de pesticides au-dessus de leur LMR. Quant aux pays du reste de la planète, dont les échantillons peuvent également avoir été importés, 100 % des échantillons issus du Laos ou du Burundi étaient contaminés. La production européenne reste ainsi moins impactée, avec en moyenne 1 à 1,8 % d'échantillons au-dessus des LMR.
Pas d'amélioration significative en France
Choux, tomates et laitues plus contaminés qu'auparavant
L'Efsa mène également un programme pluriannuel de contrôle spécifique à un certain lot de douze aliments (le même lot étant examiné tous les trois ans), l'EU MACP. En 2022, elle s'est intéressée à 11 727 échantillons (du lot total évoqué plus haut) de chou, de pêche, de tomate, de fraise, de pomme, de laitue, d'épinard, d'orge, d'avoine, de lait de vache, de vin et de graisse de porc – dont près de 90 % étaient d'origine européenne. En moyenne, au moins un résidu de pesticide a été quantifié dans environ 48 % des cas, tandis que 32 % du lot en comportait plus d'un. Deux acaricides (le formetanate et le dicofol), deux fongicides (le cyflufénamide et le prochloraze), un insecticide (pyridalyle) et un herbicide (glyphosate) représentent les produits les plus rencontrés. Plus de 10 % des pommes, des fraises, des pêches, des tomates et des laitues étaient concernées. Cela étant, l'épinard (3,4 %), l'orge (2,8 %) et le chou (2,1 %) comprennent le plus fort taux d'échantillons avec des résidus excédant leur LMR. Au total, « le nombre d'échantillons avec des dépassements de LMR a légèrement baissé, de 2 % pour le lot analysé en 2019 contre 1,6 % pour celui-ci, souligne l'Efsa dans son rapport. Néanmoins, ce ne fut pas le cas pour le chou, la tomate, la laitue, l'orge ou l'avoine. »
Néanmoins, dans le détail, parmi les 5 600 aliments végétaux, échantillons de miel ou de nourriture pour bébé (dont 55 % sont d'origine France et 16 % bio) analysés par la DGCCRF, entre 4,5 et 6,2 % d'entre eux (hormis les aliments pour nourrissons) comportaient des traces de pesticides supérieures à leurs LMR – contre 3,2 à 3,9 % en 2021. Du côté de la DGAL, ses deux programmes métropolitains (801 aliments d'origine végétale pour l'un et 1 257 aliments d'origine animale pour l'autre) et ses deux échantillonnages consacrés à la surveillance du chlordécone en Martinique et Guadeloupe (près de 4 200 échantillons cumulés) restent sous la barre des 2,5 % de résidus rencontrés au-delà de leur LMR. Un chiffre « en baisse par rapport à l'année précédente », assure la DGAL sans plus de précision. Enfin, pour ce qui est de la DGDDI (dont les 860 échantillons proviennent uniquement de pays en dehors de l'UE), au moins 4,6 % des aliments sondés présentaient des concentrations illégales de pesticides, contre 3,2 % l'année précédente.